C’est l’histoire d’un Gone né à Gerland. D’un pélo de Bron aux quatre Ligue des Champions, aux 400 buts en carrière. Au talent unanime, à la gloire sans frontières. C’est l’histoire de Karim Benzema.

Décembre 1987. Quand il y repense, le football français sourit intérieurement, forcément. L’année fut productive. Elle a vu naître le petit Hatem le 7 mars, Dimitri le 29 du même mois. Samir, lui, naît le 26 juin, quelques semaines après Blaise et Jérémy. Et pourtant, s’il savait… S’il savait que Malika Benzema allait donner vie au plus beau joyau footballistique français de l’année le 19, son fils Karim !

En passant par la Lorraine… (Source : OL)

APPELEZ-LE BENZEMA

Karim Benzema grandit à Bron, une banlieue à l’Est de la capitale des Gaules. Il est rapidement licencié au Sporting Club Bron Terraillon, le club du quartier éponyme. Karim ne met pas bien longtemps à se faire repérer par les recruteurs du club basé à la confluence du Rhône et de la Saône, dans le quartier de Gerland : l’Olympique Lyonnais. Il y intègre les équipes de jeunes à 10 ans, son sens du but impressionne déjà, sa précocité aussi.

À ce sujet, Benzema affiche 17 ans fraîchement fêtés lorsqu’il signe un contrat de trois ans avec l’OL et quand Paul Le Guen lui offre, le 15 janvier 2005, sa première sortie sous la tunique du triple champion de France de l’époque. Impact immédiat : il transforme en or le premier ballon de sa carrière professionnelle, offrant à Bryan Bergougnoux le but du 2-0 à trois minutes de la fin d’un match face aux Grenats du FC Metz.

Naissance d’une célébration iconique. (Source : Maxppp)

La saison suivante, celui qui deviendra « KB9 » inscrit – à 17 ans – lors de la dernière journée de la phase de groupes de Ligue des Champions, le tout premier but de sa carrière face aux Norvégiens de Rosenborg. Sa première victime dans l’élite française se nomme l’AC Ajaccio, le 4 mars 2006, lorsque Benzema entérine la victoire lyonnaise en Corse en inscrivant le dernier but d’une partie qui se termine sur le score de 3-1 en faveur des Gones. Le Lyonnais clôt l’exercice avec quatre réalisations toutes compétitions confondues en 16 matchs, il fera près de deux fois mieux la saison suivante avec ses neuf buts en 29 rencontres.

PETIT PRINCE DE GERLAND

La saison 2007/2008, que Karim Benzema aborde à l’âge de 19 ans, est celle de tous les records. En plus d’être statistiquement impressionnant – il marque 31 buts et délivre 11 caviars en 52 matchs – les superlatifs ne suffisent plus pour désigner le joueur décisif qu’il est devenu. Exemples : le jeune buteur égalise d’un superbe coup-franc dans le temps additionnel du derby à Geoffroy-Guichard, qualifie l’OL pour les 8e de finale de Ligue des Champions grâce à un doublé salvateur à Ibrox Stadium, s’illustre d’ailleurs contre les Red Devils de Sir Alex Ferguson au tour suivant. En France, il remporte le trophée UNFP du meilleur joueur de la saison et, collectivement, rafle tout avec l’OL en remportant le championnat, son 4e consécutif, le 7e pour l’OL, la Coupe de France, et le Trophée des Champions.

Sa dernière saison à Lyon est un peu moins fringante ; malgré ses 23 buts toutes compétitions confondues, Karim Benzema ne remporte pas de titre cette année-là pour la première fois de sa carrière, tandis que les Girondins de Bordeaux mettent un terme à sept ans de règne sans partage de l’Olympique Lyonnais sur la scène nationale. Malgré un contrat qui court jusqu’en 2013 et une volonté de rester une saison de plus entre Rhône et Saône, Karim Benzema cède aux sirènes du scintillant Real Madrid, qui signe un chèque de 35 M€ à l’OL pour intégrer ce nouveau bijou à son écrin.

GALERE IBÉRIQUE

Déchu de sa couronne par le FC Barcelone, le Real Madrid s’offre un mercato de riche pour la retrouver au plus vite. En 2009, Kaka arrive du Milan, Cristiano Ronaldo fait l’objet du transfert le plus onéreux de l’histoire pour le déloger de Manchester United, puis Karim Benzema, troisième signature retentissante de l’été madrilène, est présenté à son tour devant 15 000 spectateurs au Santiago Bernabeu.

Sa première saison dans la capitale espagnole ne correspond guère aux attentes du grand public, ni aux siennes. À titre individuel, Karim Benzema est resté dans l’ombre de Gonzalo Higuain à la pointe de l’attaque et n’a marqué que neuf buts en 33 matchs avec un Real devancé de peu par le Barça au terme d’une folle course au titre. Comme la saison précédente à Lyon, Benzema ne remporte pas de titre au terme de l’exercice 2009/2010, ce qui coûte le poste de Manuel Pellegrini : le Chilien est remplacé à l’intersaison par le Portugais José Mourinho, l’entraîneur champion d’Europe en titre avec l’Inter.

LES REPÈRES DU NUEVE

La saison suivante est toujours placée sous le signe de la concurrence pour le Lyonnais. Néanmoins, il profite des blessures d’Higuain pour prendre de l’envergure dans l’effectif du Special One. Coup du sort, ou simple symbole, il marque contre son club de cœur dès son retour à Gerland, en 8e de finale de Ligue des Champions, sur l’un de ses premiers ballons après son entrée en jeu sous l’ovation du public rhodanien. Il s’agit là, dans son jardin, du premier but marqué par le Real Madrid sur la pelouse de Gerland, mais aussi du 100e but en carrière de celui qui a illuminé l’antre du 7e arrondissement lyonnais. Karim Benzema termine sa deuxième saison espagnole avec 26 buts au compteur et son premier trophée ibérique : la coupe du Roi, qu’il remporte au terme d’une finale face au Barça à laquelle il ne prend pas part, grâce à un but en prolongations de Ronaldo.

855 buts et 351 passes décisives pour le Real en une seule photo. (Source : Icon Sport)

C’est seulement lors de la saison 2011/2012 que Benzema confirme enfin tous les espoirs que l’on pouvait nourrir de lui. La saison du Real Madrid est extraordinaire : les Merengue remportent la Supercoupe d’Espagne et atteignent la barre des 100 points points en championnat, remportant ainsi leur premier titre après quatre années de disette. Le Gone n’y est pas étranger, loin de là, en témoignent ses 21 buts en Liga, dépassant de facto les 30 réalisations toutes compétitions confondues. La saison suivante, la dernière du Mou à Madrid, symbolise un léger déclin : le Real conclut une nouvelle saison blanche et Benzema atteint péniblement la barre des 20 buts TCC.

AU SERVICE DE LA BBC

À l’intersaison, le Real Madrid s’offre le virevoltant gallois Gareth Bale. Dans la transaction, Tottenham récupère un peu plus de 100 M€, ce qui fait du nouveau numéro 11 madrilène le joueur le plus cher de l’histoire. Pour Carlo Ancelotti, le nouvel entraîneur de la Casa Blanca, et Zinédine Zidane, son adjoint, l’évidence saute aux yeux : le Real jouera en 4-3-3 avec un redoutable trident offensif – la foudre Gareth Bale à droite, la machine à buts Cristiano Ronaldo à gauche, et le connecteur Karim Benzema dans l’axe, « pour que le tout fonctionne bien », commentera plus tard le Nueve. Dès la première saison sous les ordres de l’Italien, le Real Madrid est sacré champion d’Europe pour la 10e fois de son histoire, la fameuse décima, un titre qui le fuyait depuis 2002. Le club de la capitale réalise même le doublé en s’adjugeant la coupe du Roi, il s’agit d’ailleurs toujours de la dernière édition remportée par les Merengue.

24 buts cette saison-là, 22 la suivante, Benzema reste dans ses standards devenus habituels mais le Real achève une nouvelle saison sans le moindre trophée : suffisant pour remercier Carlo Ancelotti et introniser Rafael Benitez sur le banc. C’est un fiasco, l’Espagnol est invité à prendre la porte à peine une demi-saison après son arrivée, et laisse la place à l’une des icônes de Bernabeu : Zinédine Zidane. Le Lyonnais s’avère rapidement indispensable aux yeux du Marseillais, le premier cité bouclant la saison à une moyenne de près d’un but par match en Liga et remportant sa deuxième Ligue des Champions personnelle, le Real triomphant de son voisin madrilène en finale.

Collectivement, les deux saisons suivantes de Karim Benzema sont brillantes. Il réalise le quintuplé (championnat, Ligue des Champions, Supercoupes d’Espagne et d’Europe, coupe du monde des clubs) en 2017, puis fait partie des joueurs sacrés champions d’Europe pour la troisième fois consécutive en 2018. Mais d’un point de vue plus personnel, les stats de Benzema sont en berne : 19 buts TCC en 2016/2017, seulement 12 en 2017/2018 dont cinq petites unités en championnat, un coup de moins bien qui ne plaît pas forcément au Santiago Bernabeu mais, heureusement pour le Real, CR7 s’est chargé de combler statistiquement la période délicate de Benzema.

NOUVEAU LEADER

L’été 2018 est des plus agités dans la capitale espagnole. À la surprise générale, Zinédine Zidane quitte le club après deux saisons et demi couronnées de succès. Le champion du monde est suivi quelques semaines plus tard par le légendaire Cristiano Ronaldo, claquant la porte après neuf saisons et 450 buts sous les couleurs de la Casa Blanca. Gareth Bale, lui, disparaît dans le plus grand des calmes, seul le Français est rescapé de la ligne d’attaque qui fut, avec celle de Barcelone, la plus redoutable d’Europe.

Julen Lopetegui, le successeur de Zidane, ne connaît pas pareil succès, bien au contraire. L’ancien sélectionneur de la Roja, démis de ses précédentes fonctions à la veille du Mondial russe, paie ses mauvais résultats. Santiago Solari prend l’intérim, sans plus de réussite. Le Real boucle une saison sans trophée supplémentaire, termine hors top 2 pour la seconde saison consécutive, une première depuis 1973 et 1974. Paradoxalement, Karim Benzema s’adapte très bien à son nouveau rôle de leader offensif après le départ de Cristiano Ronaldo. C’est d’ailleurs depuis le départ du Portugais que l’on aperçoit dans le jeu de Benzema un renouveau palpable : des capacités athlétiques insoupçonnées, un sens du but davantage aiguisé, et une influence dans la construction du jeu de plus en plus volumineuse.

À tout ce travail personnel s’ajoute en 2019 le catalyseur pour accélérer la métamorphose : le retour, un an après l’avoir quitté, de son fidèle partisan Zinédine Zidane sur le banc merengue. Le Real reconquiert dès lors son trône en Espagne, Benzema score à 21 reprises en championnat. Son importance et son influence grandissent toujours et la saison suivante, c’est en immense partie grâce à lui si le Real Madrid se permet de rêver de titre jusqu’à la dernière journée après avoir rattrapé presque tout son retard sur l’Atlético.

KARIM CAPITAINE

Comme lors de l’été 2018, la trêve de 2021 est placée sous le signe du renouvellement : Zinédine Zidane s’offre un nouvel adieu au Santiago Bernabeu, le capitaine emblématique Sergio Ramos s’en va passer sa pré-retraite au PSG, Raphaël Varane quitte également le navire. De retour sur le banc du Real Madrid, Carlo Ancelotti désigne Karim Benzema comme le nouveau capitaine, le numéro un Marcelo ayant perdu sa place de titulaire aux dépens de Ferland Mendy.

Bout de tissu au bras, son début de saison est tonitruant. Benzema impressionne, c’est en immense partie grâce à ses 15 buts et 7 offrandes sur la phase aller du championnat que les Madrilènes caracolent en tête de la Liga à la mi-saison. Avant-hier, le 22 décembre, son doublé à San Mames lui a permis de franchir la barre des 400 buts en carrière. Seul Français devant Benzema sur cette statistique-là, Thierry Henry s’était arrêté à 411. Grâce à ce doublé, le premier but marqué en 2022 par KB9 sera son 300e avec les Merengue – le tout en à peine plus de 580 matchs. Aussi meilleur passeur de l’histoire du Real devant Ronaldo avec ses 152 assists, Benzema, 41 600 minutes de jeu sous le maillot madrilène, est ainsi directement impliqué dans un but toutes les… 92 minutes seulement !

1, 9. Un neuf. Un immense attaquant. (Source : AFP)

Karim Benzema, c’est aussi 76 buts en 135 matchs de Ligue des Champions (dont un seul penalty !), l’attaquant français – buteur à chaque édition depuis la saison 2005/2006 – se situe au pied du podium des meilleurs buteurs de l’histoire de la compétition, derrière Ronaldo (140), Messi (125) et Lewandowski (82).

PARTIR POUR MIEUX REVENIR

94 sélections à l’heure actuelle pour 36 buts… Qu’en aurait-il été s’il n’y avait pas eu ce « si » ? Karim Benzema fête sa première en Bleus en mars 2007 face à l’Autriche. Le joueur de l’OL ne met pas longtemps à convaincre puisqu’il inscrit le seul but de la rencontre. Benzema est de l’aventure – du fiasco, plutôt – austro-helvétique, lorsque la France prend la porte dès la phase de poules de l’Euro 2008. Deux ans plus tard, Raymond Domenech laisse le nouveau madrilène sur la touche pour le désastre sud-africain. Avec Laurent Blanc, il regagne sa place de titulaire indiscutable, participe à l’Euro 2012 polono-ukrainien. Didier Deschamps lui confirme sa confiance en le faisant disputer l’intégralité des matchs du mondial brésilien, puis en 2015, survient le fameux couac : la carrière bleue de Benzema reste en stand-by alors qu’il comptabilisait à l’âge de 27 ans, 27 buts et déjà 81 sélections.

Son comeback sur le devant de la scène pour l’Euro 2020 était sûrement moins attendu qu’un retour des dinosaures sur Terre. Sa présence dans la liste des 26 suscite la surprise et l’effervescence d’un pays. Benzema ne met pas bien longtemps à enfiler la parure du sauveur : la France accroche le Portugal en poules grâce à son doublé, renverse la Suisse en 8e suite à deux nouveaux buts du Lyonnais avant qu’il ne cède sa place en début de prolongation.

Karim Benzema remporte finalement son premier trophée avec l’Equipe de France en octobre dernier, la Ligue des Nations, au terme d’une finale remportée face à l’Espagne (2-1) et marquée par un but splendide du joueur du Real, quelques jours après une victoire renversante face à le Belgique en demi-finale, où Benzema avait été le grand artisan du réveil tricolore. Qualifiée pour le Mondial au Qatar, l’Equipe de France bâtit son succès avec une attaque autour de Benzema, dont la complicité avec Mbappé et Griezmann sur les derniers matchs des Bleus fut pleine de promesses.

Inutile d’énumérer le palmarès pantagruélique de 27 trophées de Karim Benzema pour situer l’envergure du personnage. À force de travail et de talent, le petit gone de Bron n’a eu cesse de s’améliorer au fil du temps. La pépite de l’OL, devenue l’idole de Bernabeu, atteindra incessamment la barre de 300 réalisations avec le Real Madrid, symbole d’une activité au sein du jeu, d’un sens du but et d’une adaptation au collectif qui l’entourait et qu’il entourait que l’homme au bandage à la main droite a su parfaire. Karim Benzema, c’est aussi une unanimité nationale, un pur produit lyonnais qui rend chaque jour on ne peut plus fier un peuple très chauvin. Bien qu’il continue à déclarer sa flamme au Real Madrid, KB9 a également ouvert la porte à un retour à Lyon avant la fin de sa carrière. 69 la trik, certes, mais avec Karim, sis 9 la trik.

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