Meilleur buteur de l’histoire de Grenoble et d’Istres, l’ancien international algérien Nassim Akrour est loin d’avoir quitté le monde du football. À 48 ans, c’est à Chambery, dans le monde amateur, qu’il transmet sa passion sur le terrain et depuis le banc de touche. Un homme expérimenté qui connait les risques d’une fin de carrière pour un joueur professionnel et qui veut encore repousser la sienne aux niveaux inférieurs.


Comment avez-vous préparé dans votre tête ce passage chez les amateurs ?

Difficilement. On ne sait pas exactement quand est-ce que cela doit se terminer, tout dépend du corps, de savoir si on peut continuer ou pas. Il faut réfléchir à ce que l’on va faire après. Soit dans le domaine du football, soit dans d’autres domaines.

Et avec vos proches ?

Nous en parlions, mais ce n’était pas un sujet du quotidien. C’est difficile de répondre à cette question, parce que j’ai toujours eu envie de jouer. Mais il faut aussi penser à après car c’est là que c’est délicat. Ce « après » est très difficile. Quand tu arrêtes ta carrière professionnelle, tu te rends compte que l’accès à une reconversion dans un club est compliqué puisqu’il y a beaucoup de demandeurs.

Il y a un vide si vous ne trouvez pas ce rebond…

(Il coupe). Oui ça fait un vide ! Je pense que, en entendant les autres et ce qui se dit dans le monde du football, c’est difficile parce que les postes sont restreints.


« J’ai arrêté ma carrière professionnelle en 2013, mais je continue à jouer en amateur où ça se passe très bien ! »


Quel a été votre accompagnement pour préparer cette bascule dans votre carrière ?

On est tous accompagnés par un agent qu’on a eu tout le long de notre carrière, qui nous a conseillé. Après, il y a les connaissances, des entraîneurs, des personnes qu’on côtoie au quotidien. J’ai arrêté ma carrière professionnelle en 2013, mais je continue à jouer en amateur où ça se passe très bien ! Il faudra voir ce qui se passera plus tard. Tout le monde n’a pas la chance d’être accompagné. On sait très bien qu’après la carrière, nous sommes vites oubliés.

Et il faut savoir bien s’entourer pour réussir cette préparation.

Mais ça tu le fais très très jeune, ça commence tout de suite. Aujourd’hui on voit que les clubs s’appuient plus sur les jeunes. À travers les montants astronomiques des salaires, on y voit une opportunité d’escroquer la personne.

(Source : elwatan-dz.com.)

Vous souvenez-vous de cette décision de passer chez les amateurs ?

Oui, c’était en 2013, j’étais à Istres et j’étais en âge de me demander si c’était le moment de voyager partout ou de rentrer. C’était compliqué. J’avais pris cette décision d’arrêter le monde professionnel. Grenoble m’avait appelé pour aider le club après le dépôt de bilan. Moi, j’étais très attaché à ce club depuis longtemps ! L’ambiance est différente, mais Grenoble avait continué le rythme des entraînements tous les jours, tous les matins. Le quotidien sportif ne changeait pas, le statut si. Le GF38 avait cette expérience du monde pro, la preuve en est, ils sont vite remontés en Ligue 2. Mais tout ça, ce sont des choix individuels. Chaque joueur a son ressenti à un moment donné de sa carrière. Après tu peux avoir l’opportunité d’une personne qui t’appelle en te disant : « Est-ce que tu veux prendre ? » ; « Est-ce que tu veux commencer ça ? », etc. Si tu as la chance de tomber sur quelqu’un qui te propose quelque chose de par ton expérience, parfois il faut dire oui et essayer d’entamer une nouvelle vie.

Mais dans le football ce sont toujours ces expériences qui sont déterminantes. Même si ce sont des CDI, le club peut se séparer de toi. C’est un métier, que ça soit footballeur ou dans l’encadrement, ce sont les résultats qui priment. Quand tu n’as les bons résultats ils peuvent te changer directement, se séparer et dire « merci ». C’est un monde où il y a une pression intense. Tout le monde dit que c’est bien, oui c’est bien, mais il y a aussi des inconvénients derrière, il faut avoir les épaules solides.

Aujourd’hui vous êtes à Chambéry qui n’a pas la même expérience que Grenoble, comment le vivez-vous ?

J’y suis depuis 2019, ça se passe très bien ! On s’entraîne, on prend du plaisir. À côté de ça j’entraîne un peu les U18 à certains moments de la semaine. Ce n’est que du plaisir. Tu retrouves un peu moins de pression. Quand tu es en pro tu as ton contrat de travail et pour en avoir un autre il faut être performant tout le temps, ça demande de la discipline. À mon âge maintenant on s’entraîne trois fois, je ne peux pas aller courir comme je courais avant.


« Quand tu n’as pas de club, il faut penser à ce que tu peux faire. C’est à dire retourner dans la vie active avec un métier plus classique. »


Entraîner les U18, c’est une manière de compenser pour ne pas avoir ce vide ?

Oui, mais c’est un plaisir avant tout. J’ai envie de continuer d’aider le club, d’apprendre, de le structurer… L’idée c’est de donner l’envie, le plaisir de s’amuser, de jouer à des enfants, des jeunes. Je me dis que récemment nous sommes passés par des saisons où on était enfermés au quotidien, où la violence s’est accentuée, on est devenus impatients. Il faut redonner du dynamisme à ces jeunes, les faire reprendre du plaisir.

Selon vous, quels sont les risques principaux dans une fin de carrière ?

De ne pas trouver de club, de ne pas avoir de situation. Dans ce circuit tu es vite oublié. Il y a d’autres gamins qui arrivent et qui prennent ta place. Tout le monde a envie de jouer, mais quand tu n’as pas de club, il faut penser à ce que tu peux faire. C’est-à-dire retourner dans la vie active avec un métier plus classique. J’ai toujours dit qu’il faut pallier le sport avec le scolaire. C’est difficile puisque dès qu’on a entamé la carrière professionnelle, on n’a pas forcément dans l’esprit de se dire qu’il faut le faire. J’ai eu un BTS électronique, ce n’est pas pour autant que je vais aller travailler dans l’électronique. Je l’ai eu en 1996… c’est impossible avec toute la technologie d’aujourd’hui.

Aujourd’hui, quand les joueurs ne trouvent pas de club, ils sont perdus, ils ne savent pas quoi faire. Ils doivent appeler les bonnes personnes pour les orienter, savoir ce qu’ils ont envie de faire. Ce n’est pas forcément négatif, tu peux rebondir dans de nombreux domaines !

Propos recueillis par Oscar Josse.

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